Murielle Biales : « La Sécu sait faire une vraie place aux femmes dirigeantes »
Murielle Biales est Secrétaire générale de la Caisse nationale d’Assurance Vieillesse (Cnav). Entrée à la Sécurité sociale en 2000, cette passionnée des transformations a mis un point d’honneur à concilier plaisir au travail et équilibre personnel. Pour #Leaddersauféminin, une nouvelle rubrique sur les femmes dirigeantes à la Sécurité sociale, elle revient sur son parcours.
La Sécu et vous, c’est une grande histoire ?
En effet ! J’ai intégré l'École nationale supérieure de la Sécurité sociale (EN3S) - qui s’appelait à l’époque le CNESSS - après mes études à Science Po Paris. J’avais été immédiatement attirée par cette école, car elle prépare à une diversité de fonctions. Puis, j’ai démarré à la Sécu en 2000, c’était assez magique car j’ai très rapidement touché du doigt cette diversité. J’ai commencé comme chargée de mission à la Caisse Nationale d’Assurance Vieillesse des Artisans (Cancava).
Ensuite, j’ai eu la chance d’être au cœur de grands changements au sein de l’institution : la création du Régime social des indépendants (RSI) en 2006, qui a « absorbé » la Cancava, puis l’intégration du RSI au Régime général, en 2020. J’ai mené ma carrière en région parisienne, avec une orientation « retraite » assez rapide, puisque j’ai été Directrice de la Production Retraite et du Service aux Assurés au RSI de 2015 à 2018, avant d’intégrer assez naturellement la Cnav, en tant que Directrice nationale préfiguratrice des Travailleurs indépendants au sein de la Direction de la Transformation.
Enfin, je suis devenue Secrétaire Générale en novembre 2018, ce qui m’a permis d’élargir et d’enrichir grandement mes expériences en découvrant de nouvelles activités et de nouveaux métiers.
« Ce qui m’a attirée, c’est cette forme d’excitation intellectuelle, de ne pas être spectatrice de la Sécu, mais d’être actrice de ses changements. »
Qu'est-ce qui vous a donné envie de devenir dirigeante ?
Je ne suis pas une personne qui a construit une stratégie de carrière classique articulée autour de cases à remplir et de jalons à franchir, de manière systématique. Je dirais que mes managers successifs ont su me donner ma chance, et qu’ils m’ont permis de saisir des opportunités.
J’étais aussi dans des secteurs qui se sont beaucoup transformés, et cela m’a permis d’accéder rapidement à des fonctions de direction dans des domaines de compétences qui se sont étoffés. Cela ne signifie pas que je suis complètement dénuée d’ambitions, mais mon critère premier a toujours été le plaisir et l’intérêt que je voyais dans mon poste.
Plus que le statut de dirigeante, ce qui m’a attirée, c’est cette forme d’excitation intellectuelle, de ne pas être spectatrice de la Sécu, mais d’être actrice de ses changements. Être dirigeante, c’est une chose, mais se sentir utile, c’est ce qui me motive.
« Il ne faut pas s’interdire de faire carrière, en pensant qu’on devra renoncer à des passions, des projets personnels. »
Qu’est-ce que #Leaddersauféminin vous inspire ?
Personnellement, je n’ai jamais eu l’impression qu’être une femme était un frein ou me posait une difficulté. Je pense que la Sécu fait une vraie place aux femmes qui souhaitent atteindre des postes de management supérieur, et c’est loin d’être le cas dans tous les environnements professionnels !
Bien sûr, atteindre ces postes ne se fait pas sans aucune difficulté, parce qu’ils sont porteurs d’exigences, de manière intrinsèque bien entendu, mais également au titre de la mobilité. La mobilité entre les branches et les régimes d’une part, qui n’est pas toujours facile à décliner, mais aussi la mobilité géographique. Je pense d’ailleurs que ce sujet est loin d’être spécifiquement féminin, même si concilier carrière professionnelle et équilibre de la vie personnelle dans le cadre d’une mobilité est encore, il est vrai, parfois d’autant plus complexe pour les femmes, mais selon moi, plus en raison d’a priori sociétaux que de l’environnement Sécu lui-même.
Je pense en tous cas qu’à la Sécurité sociale, il est possible de concilier vie personnelle et professionnelle, tant pour les hommes que pour les femmes, et que c’est une vraie chance.
Quel message avez-vous envie de partager avec des femmes, voire avec n’importe quel dirigeant ou futur dirigeant, qui réfléchissent à leur carrière ?
Je leur dirais qu’il ne faut pas s’interdire de faire carrière, en pensant qu’on devra renoncer à des passions, des projets personnels. Si je ne devais donner qu’un seul conseil, ce serait « ne renonçons à rien ! ». Non pas parce qu’on est des « wonder women » ou des super héros, mais pour se construire un environnement qui nous convient.
Aujourd’hui, être cadre dirigeant à la Sécu c’est beaucoup de travail, d’investissement et d’exigences mais personne ne nous demande de nous sacrifier sur l’autel de la Sécu chaque matin, c’est une institution qui est respectueuse de l’humain, y compris de l’humain cadre dirigeant. Il y a des passages obligatoires dans une carrière de dirigeant à la Sécu, mais avec quel objectif, à quel rythme, et avec quels détours, cela appartient à chacun...
« Je suis intimement convaincue que la Sécu est parfois trop prudente et trop modeste par rapport à ce qu’elle fait »
À quoi ressemble votre quotidien de Secrétaire générale ?
Je n’ai pas de journée type. J’ai énormément de réunions, comme tout le monde, et assez naturellement un rôle de management d’un collectif par ailleurs composé de manière très diversifiée, regroupant, des Agents de directions, des cadres managers de domaines très éclectiques... Cette dimension managériale est une vraie richesse.
Mon quotidien, c’est d’élaborer et de porter des stratégies pour la Cnav, dans le domaine immobilier, budgétaire, du pilotage, des achats, des marchés… et de les rendre intelligibles. Pour cela, j’ai besoin de comprendre, j’aime que les dossiers soient bien préparés pour éviter d’avoir à prendre ou à faire prendre des décisions de manière approximative.
Je fonctionne également beaucoup en mode participatif et coopératif. J’apprécie les échanges de points de vue et la transparence, et j’ai la chance d’avoir une équipe et des collègues qui s’inscrivent également dans cette dynamique. Je travaille tout le temps sur des sujets nouveaux et cela amène forcément des moments de doutes, mais je pense que c’est constructif, c’est aussi mon garde-fou.
De quoi êtes-vous la plus fière dans votre parcours ?
Je suis intimement convaincue que la Sécu est parfois trop prudente et trop modeste par rapport à ce qu’elle fait. Je suis très fière de travailler à la Sécu, car nous participons à une mission très noble. Je crois beaucoup à notre modèle : c’est aujourd’hui un amortisseur de chocs absolument essentiel. Nous ne sommes pas dans une gestion « pépère », comme on pourrait l’imaginer de l’extérieur.
Nous avons une pression financière, car nous devons faire notre place dans un monde concurrentiel, avec la crainte, parfois, de notre disparition. C’est un stimulus très important, qui nous amène à nous questionner.
Aujourd’hui, on ne valorise pas assez nos services à l’extérieur : en matière d’accompagnement et de conseil aux assurés, d’action sociale mais aussi d’innovation et nous n’osons pas toujours dire haut et fort que nous sommes aussi bons que les autres. C’est aussi cette fierté que j’ai envie d’insuffler aux agents de Direction actuels, et à ceux qui aspirent à le devenir.
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